Jeudi 25 septembre, vide



Je voudrais aujourd’hui remercier l’ami Gertrud et son invisible main qui a posé le premier commentaire de ce dossier-blog au bas de mon dernier message. Quel homme. Je n’ai malheureusement pu lui répondre, n’ayant de vue sur rien de ce qui lui appartient, et étant du reste bien peu informé de vos techniques et possibles informatiques. Rose daigne m’aider parfois mais il est si fatigué. J’invite donc Gertrud à préciser mon savoir et le sien sur vos humaines variétés ici-même quand il le souhaite. J’ai été charmé, et à vrai dire réconcilié avec votre monde, pour un faible temps.

Laissez-moi vous expliquer. Ces derniers jours ont été si révoltants que ma main a bien failli partir, et avec elle le reste de ce pauvre corps qui m’appartient. Je vais commencer par la plus affolante coutume qui m’ait été donnée d’observer. J’ai entendu, l’autre matin, dans le poste de radio, cette information :

Une personne est morte, lundi 22 septembre, dans l'incendie d'un immeuble de la Ville de Paris, boulevard Soult, dans le 12e arrondissement. Le sinistre s'était déclaré au dernier étage du bâtiment.

Bien sûr, si j’ose dire, le fait, noyé dans le désordre habituel de vos catastrophes et forfaits, ne me fit pas sursauter. Je commence à comprendre que les émotion humaines, la compassion, les cris, la haine, se contrôlent quotidiennement pour se relâcher en certaines occasions de choix. Et moi-même, observateur de peu, je me laisse faire, c’est vrai, la plupart du temps, par vos mouvements.

Rose plaisanta excessivement ce jour-là, et réussit pour la première fois à peloter mes nerfs. Il me fit croire, tenez-vous bien, que ce petit homme fadasse dont j’apprécie la puissance comique était réellement le président de votre république, élu au suffrage universel, Nicolas Sarkozy. Avec aplomb, il soutenait que je voilais le réel pour il ne savait quelle raison, qu’il fallait que je m’y fasse si je voulais comprendre les citoyens de ce pays.

Ce n’était pas possible, cet homme si drôle, président. Cette laideur sourde, cette nonchalance crâne, ces longs bras absurdes et cette démarche si amusante ne pouvaient être le fruit de la nature. Seul un très bon comédien peut composer une si impressionnante caricature de la politique telle que j’ai pu la voir s’exercer dans votre monde. Et ces discours, que faisait Rose de ces mots vides et de ses yeux moqueurs ? Et cette témérité dans les épaulettes, offerte en mouvements saccadés, nerveux, mêlée à la mollesse de l’ensemble et à une raillerie cachée quelque part entre un sourire retenu et des bottines à talonnettes, on ne pouvait qu’inventer cela !

En me défendant, je vous défendais.

Rose continuait, sauvage.

Il était exactement 17 h quand j’ai cessé de le croire. C’est une délicieuse tarte à la rhubarbe qui nous réconcilia. J’appréciai à cette heure vos saisons, qui produisent à temps partiel différents fruits et légumes. On se lasse à peine de l’un que l’autre apparaît, tendre et joyeux, au coin d’un champs.

Rose avait invité, pour célébrer cette tarte, une de ses amies, Jeanitte. C’est elle qui me fait revenir maintenant à l’affolante coutume dont je parlais plus haut, et qui désola ma semaine.

Jeanitte habitait, il y a trois semaines encore, dans une de ces chambres qui a pris les flammes. Elle m’expliqua ce qu’était une chambre de bonne et comment s’agençaient la série de celles qui composaient l’étage. L’immeuble appartenait à vos institutions d’aide aux plus démunis. Il n’y avait ni douche ni eau chaude, et tout cela risquait de brûler depuis bien longtemps. Et surtout, il y avait un homme, malade, un de ces hommes parmi vos hommes qui n’avait plus sa tête d’homme, livré à lui-même dans une des chambres. Cet homme est mort.

Et Jeanitte sait que cette mort a soulagé plus d’un homme et plus d’une femme vivant plus bas une vie lisse construite sur la propreté et le malaise face à l’odeur des hommes qui n’ont plus leur tête d’homme. Jeanitte pleurait presque. Car cet homme sans tête avait juste besoin d’être soigné, et si l’enquête découvrait que c’est lui qui avait mis les flammes, l’autre petit homme mou et comique dirait encore que ces hommes-là ne méritent que la prison.

Excusez-moi, là encore, je ne comprends pas tout. Mais j’avoue être lassé, et mon envie de partir demeure intense. D’abord, le fait qu’un comique ait du poids sur vos institutions me dépasse. Ensuite, que vos informations réputées si justes ne donnent pas ces détails sur une affaire m’alarme (pour toutes les autres que j’entends jour après jour). Et enfin, qu’un homme qui n’a plus sa tête d’homme soit décrété plus dangereux pour les autres que pour lui-même, là, je ne comprends plus rien.

2 commentaires:

Loïc a dit…

Nicolas Sarkozy...avec un z -))))

Raymonde a dit…

c'est que cette personne ne figure pas dans le dictionnaire... erreur corrigée, cher Loïc. Merci